Dr Laurence PLUMEY. Médecin Nutritionniste. Fondatrice d’EPM NUTRITION
Avec les épices, on peut faire le tour du Monde au sens propre et au sens figuré. Au delà des sensations et des émotions qu’elles procurent, les épices ont quasiment toutes des vertus santé assez proches, souvent anti-oxydantes et anti-inflammatoires (plus ou moins puissantes selon les épices), que l’on peut exploiter aussi bien à titre préventif (pour être et rester en bonne santé) qu’à des fins thérapeutiques (diabète, maladies inflammatoires digestives ou articulaires). En France, nous sommes surtout des grands consommateurs de sel et de poivre, mais qu’en est-il des autres ? Curcuma, paprika, gingembre, ginseng, curry …. la cuisine exotique en est riche et donne l’exemple. Alors, imitons la et découvrons toutes ces saveurs utiles.
Le poivre : du blanc au noir …
Qu’il soit vert, noir ou blanc, le poivre vient du même fruit séché du poivrier. Jeune, il est vert – bien mûr, fermenté puis séché il devient noir – et sans son écorce extérieure, il devient blanc. Quant au poivre gris, c’est du poivre noir moulu (le cœur du grand poivre est blanc). Poivre de Sichuan, baies roses, poivre de Cayenne, poivre du Timut … autant de goût et d’odeurs différentes, mais un point commun : la pipérine. Elle augmente l’absorption intestinale de la curcumine. Attention aux personnes qui ont l’estomac sensible.
Piment et paprika : cousin, cousine.
Le piment est un fruit dont les graines et la tige interne sont les plus chargées en principes piquants, comme la capsaïcine. Le poivron et le paprika sont ceux qui en contiennent le moins ; le piment de Cayenne est très fort ; le piment d’Espelette est plutôt doux. La capsaïcine a la propriété de stimuler nos récepteurs en bouche sensibles à la chaleur et à la douleur. Activés, ils transmettent ces messages au cerveau, raison pour laquelle nous ressentons chaleur et parfois sensation de brûlure douloureuse (alors que notre muqueuse buccale n’est pas agressée). En somme, cette molécule leurre notre cerveau.
Un bon conseil : si cela chauffe en bouche, faites comme les Indiens d’Inde, buvez un peu de lait ou de yaourt liquide (et non pas de l’eau) car la capsaïcine est soluble dans le gras, et non dans l’eau.
La cannelle : douce et pourtant redoutablement anti-oxydante.
De toutes les épices, elle a l’un des pouvoirs anti-oxydants les plus puissants. Une cuillère à café de cannelle contient plus d’anti-oxydants qu’un bol de fruits rouges ! Elle correspond à l’écorce du tronc du cannelier, un arbre puissant qui pousse dans les forêts de Ceylan, de Madagascar ou d’Indonésie. On décortique l’écorce durant la saison des pluies et on la laisse sécher ; elle est ensuite commercialisée soit en petits tuyaux, soit en poudre. La cannelle de Ceylan est celle qui a l’arôme le plus doux, le plus rond ; celle du Vietnam est plus corsée. Ajoutée dans les plats, elle permet de réduire l’adjonction de sucre. Mettez-en dans vos compotes et dans vos salades de fruits, avec de la menthe …
Le curcuma : l’or rouge !
C’est une plante dont on consomme le rhizome (sa partie souterraine). Son principe actif est la curcumine, un anti-oxydant de la famille des polyphénols, mais c’est aussi le pigment jaune orangé qui lui donne sa belle couleur – au point d’être utilisable comme colorant naturel (E100). La curcumine a des propriétés anti-inflammatoires utiles pour lutter contre les inflammations digestives. Pour calmer les articulations douloureuses, elle a besoin d’être aidée de la pipérine (ou du gingembre) pour traverser la muqueuse intestinale et passer dans le sang. Pour qu’elle soit efficace, en gélules, la concentration doit être élevée (au moins 300mg par jour).
L’origan : une herbe aromatique très précieuse
Marjolaine sauvage ou douce, elle appartient à la même famille botanique que le thym ou la sarriette. Riche en huile essentielle (d’ou son arome puissant), elle est ajoutée aux plats en étant séchée. Ses feuilles ont un pouvoir anti-oxydant élevé, et en Grèce comme en Chine, elle est très utilisée aussi en tisane pour faciliter la digestion. Toujours l’ajouter en fin de cuisson.
Le gingembre : épicez vos sens !
Frais, en saumure, confit, déshydraté, mixé dans des jus de légumes ou de fruits, il y en a pour tous les goûts. Doux, légèrement sucré, citronné et piquant, il est très aromatique. Ses vertus anti-oxydantes et anti-inflammatoires sont dues au gingérol qu’il contient, et sont très complémentaires de celles du curcuma. C’est un très bon anti nauséeux (mal des transports) et antiseptique intestinal. Il contient 477 composants actifs ! En Chine, c’est le « médicament universel ». Pour profiter de ses bienfaits, en consommer au moins 5g par jour (une tranche d’un demi centimètre).
De l’ail, des aulx !
L’ail était déjà consommé il y a 5000 ans et de nombreuses vertus santé lui étaient accordées. Il faut dire qu’il est un vrai concentré de principes actifs, bien caché dans sa petite gousse. Pour rappel, une tête d’ail renferme en moyenne 10 à 12 caïeux (gousses d’ail) qui possèdent en leur centre un petit bourgeon. Chaque gousse ne pèse que 3 à 4g ; c’est peu et pourtant, grâce à sa richesse en composés soufrés et anti oxydants (alliine et allicine essentiellement), l’ail a été très étudié dans le domaine des maladies cardio vasculaires. A la dose de près de 3g par jour (une gousse d’ail), on obtient une baisse de 3 à 5% de la pression artérielle chez des personnes hypertendues, effet constaté à partir de 8 à 12 semaines de consommation quotidienne (effet non constaté chez des personnes normo-tendues). Pas de quoi remplacer les traitements, mais peut être suffisant pour en abaisser un peu les doses et donc les effets secondaires. Par ailleurs, une dose de 10g par jour (2 gousses) améliore le profil lipidique en augmentant le taux de bon cholestérol, et baissant le taux de triglycérides. En somme, l’ail est un bon allié en prévention des maladies cardio vasculaires.
L’ail des ours : Ainsi appelé car la légende voulait que les ours en raffolaient à la sortie de leur hibernation pour se redonner force et vitalité, l’ail des ours est un ail sauvage, au goût très fin et parfumé, qui pousse dans les sous bois humides. Il est récolté d’avril à juin.
L’oignon, à en pleurer de joie.
Il appartient à la famille des alliacés, au même titre que l’ail. Il partage donc beaucoup de points communs avec lui, entre autres la richesse en composés soufrés, et en antioxydants. Mais il s’en distingue par deux points. Il est en effet plus riche en quercétine (flavonoïde anti-oxydant) et en anthocyanidines (autres anti oxydants) particulièrement présents dans les oignons rouges auxquels ils prêtent leur couleur violette. De fait, les oignons rouges ont un pouvoir anti oxydant plus élevé que l’oignon blanc et jaune. La quercétine a la propriété de diminuer l’oxydation du mauvais cholestérol et donc de mieux préserver la santé cardio vasculaire. En règle générale, plus un aliment est riche en anti-oxydants, plus il contribue à lutter contre le vieillissement cellulaire et la génèse des cancers.
Au-delà des qualités de chacun, il est intéressant de noter que lorsque l’on mélange diverses épices, elles se complètent entre elles et augmentent leur potentiel santé. Ainsi, consommées régulièrement et généreusement, elles diminuent le risque cardio vasculaire et contribuent à mieux réguler la glycémie des diabétiques. De plus, ajouter des épices à ses plats permet de manger moins salé et cela donne du goût … aux légumes. Intéressant pour en faire manger aux enfants !